Depuis cette date, les Terriens ont consommé depuis le début de l’année plus de ressources que la Terre ne peut en produire en un an.


Depuis ce 27 septembre, nous vivons à crédit sur le dos de la planète

La date est passée, les Terriens ont consommé depuis le début de l’année plus de ressources que la Terre ne peut en produire en un an.

C’est comme si le 23 du mois tout notre salaire était dépensé.

Formulé selon notre modèle économique et consumériste, depuis ce jour, nous vivons à crédit.

C’est en tout cas une ONG qui nous le dit (*).

Sur un forum à ce sujet, un incrédule fait remarquer : « contrairement aux banques ou aux politiciens, la planète n’accepte pas de bouts de papier à la place de biens réels. La Terre ne fait pas crédit et dès lors, ce que nous consommons ici et maintenant correspond exactement à ce que nous trouvons et produisons« .

Que répondre ?

Peut être ceci :

Un peu d’histoire.

L’homme est apparu sur Terre bien après sa formation, bien après l’apparition des microbes, des végétaux et des minéraux.

Pendant les millions d’années qui nous ont précédées, la planète s’est formée, s’est couverte de terres et de mers où règnent micro-organismes, animaux et végétaux. Une couverture de gaz s’est créée dans l’atmosphère la protégeant des rayons du soleil, comme sous un parasol, et du froid nocturne, comme dans une serre.

C’est dans cet environnement que l’homme est apparu, que nous sommes nés. Ces ressources sont à notre dispositions. Donc, nous les utilisons. Nous ne sommes pas les seuls puisque par exemple les gazelles broutent les végétaux, les lions mangent les gazelles, les baleines engouffrent des tonnes de crevettes minuscules qui se nourrissent elles même de phytoplancton, les chauves souris nichent dans les grottes… Chaque être vivant ne survit que parce que l’environnement le lui permet.

Un équilibre s’est créé dans la nature, il ne peut pas y avoir plus de lions que ne le permettent les ressources en gazelles et pas plus de gazelles que ne le permettent les ressources en pâtures.

Dans cet équilibre, l’intensité avec laquelle les ressources sont exploitées dépend de leur capacité à se reconstituer. Cette capacité dépend des espèces elles mêmes. Les souris peuvent avoir 50 petits par an. Les éléphants mâles commencent à se reproduire vers 30 ans. Il faut 10 ans pour qu’un thon rouge atteigne 150 kg. Il faut 1ha de terre pour produire annuellement 3,5 stères de bois.

Mais, voilà, l’homme évolue, vite, très vite. Les technologies qu’il développe lui permettent d’exploiter plus intensivement les ressources naturelles que toutes les autres espèces vivantes. Cette exploitation ne respecte plus les cycles naturels de régénérescence des ressources. C’est le contraire du « développement durable » .

Un exemple ?

En Europe, à la vitesse à laquelle le bois (chauffage, construction, ameublement, papier, industrie…) est consommé, les Hommes auraient vite fait le désert autour d’eux. Pourtant, la surface boisée du continent reste stable. Le complément est prélevé ailleurs, entres autres dans les forêts millénaires, situées sur d’autres continents, dont les surfaces diminuent inexorablement.

Un autre exemple ?

Les techniques de pêche modernes rendent très efficace la recherche du poisson. Le prélèvement annuel de thon rouge est désormais plus de 2 fois supérieur à la capacité de reproduction de l’espèce. Résulat, ces poissons sont de plus en plus rares.

Une nouvelle illustration ?

Pour grandir, une plante se nourrit de ce qu’elle trouve dans le sol. Dans un cycle naturel, ou une agriculture raisonnable, une plante pousse, puis meurt ou se fait dévorer par un herbivore. La matière qu’elle contient est rendue au sol grâce à la faune et microfaune du sol. Dans les cultures intensives les récoltes se succèdent rapidement. Semis, récole, semis récolte, les cycles passent et se ressemblent. Où est la matière organique? On ne trouve un peu dans les quelques marginales pulvérisations de lisier de porc riche en antibiotique. Sinon, pas de matière organique. Un peu d’azote(N), de phosphore(P) et de potassium(K) constituent le régime NPK de la plante. De cette manière l’homme croit pouvoir indéfiniment réutiliser le sol pour de nouvelles cultures. Vraiment? Et sans effets à long terme ? Ne nous leurrons pas, le sol ainsi vidé de son carbone perd ses propriétés. Ainsi, pour ne citer qu’une conséquence, il devient moins perméable. De ce fait, les précipitations ruissèlent au lieu de s’infiltrer, provoquant coulées de boues et inondations lors des orage et déshydratation du sol après quelques jours d’ensoleillement.

Un petit dernier ?

Le pétrole résulte de l’histoire géologique de la Terre. Des millions d’années et une combinaison de températures et de pressions particulières ont été nécessaires pour transformer de la matière organique animale en huile minérale riche en carbone. C’est la raison pour laquelle le terme d’énergie non renouvelable est utilisé pour qualifier cette ressource naturelle. L’homme moderne fait grande consommation de cette manne d’énergie providentielle. Il aura consommé en moins de deux siècles une ressource qui a nécessité des millions d’années pour être produite par la nature. Combien de temps cette consommation effrénée des ressources pétrolières pourra-t-elle encore durer ? Aujourd’hui, pour six barils consommés, un seul est découvert.

Revenons-en à nos moutons.

Quand sont coupés d’avantage d’arbres qu’il n’en pousse, quand la pêche industrielle menace la survie de certains poissons, quand un sol est exploité jusqu’à en modifier irréversiblement la structure et quand une énergie fossile non renouvelable est consumée en quelques décennies, en terme financier, n’est-il pas correct de parler de consommation du « capital ressources terrestres » ?

Consommation du capital et non des intérêts, car cette consommation est bien plus élevée que les ressources que la Terre produit naturellement en une année.

Je ne rejoins donc pas cet internaute qui dit que ce que nous consommons ici et maintenant correspond exactement à ce que nous trouvons et produisons.

Mais de là à dire que nous vivons à crédit, effectivement, il y a un pas.

Quand quelqu’un hérite d’un bien ou d’une belle somme d’argent, il peut le gérer en bon père de famille, profiter des intérêts et léguer le moment venu le capital à ses enfants. Mais il peut aussi en profiter, dépenser toute la fortune et ne rien laisser derrière lui. Agir de la sorte peut-il être qualifié de « vivre à crédit » ? Absolument pas. Cette somme appartient à l’héritier qui en dispose à sa guise. Certes, les enfants auraient certainement préféré pouvoir aussi hériter d’un capital et profiter du même confort que leur parent, mais nous sortons du cadre de la définition.

Pour conclure cette analogie entre le modèle financier et la consommation des ressources naturelles, si nous partons du principe que les humains de la génération actuelle sont propriétaires de la Terre, par héritage, alors, nous consommons le patrimoine légué par nos ancêtres comme nous l’entendons et nous n’avons aucune obligation à l’égard de nos contemporains et de nos descendants. Pas de vie à crédit donc.

L’égoïsme qui ne dit pas son nom en quelque sorte. Tout va bien, les consciences sont tranquilles. Celles de certains peut être… la vôtre, je ne sais pas, mais moi, ça me dérange…

C’est ici que je cesse mon exercice de rédaction et que je vous invite à méditer sur ce proverbe africain popularisé par Antoine de Saint-Exupéry: « nous n’héritons pas la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants« .

Pour la locale Ecolo de Berloz

Anne-sophie Ourth